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Rapport de la commission d'examen

Sommaire

Dans une déclaration commune faite en 1978, les gouvernements canadien et ontarien demandaient à Énergie atomique du Canada limitée (EACL) d'élaborer un concept de stockage permanent des déchets de combustible nucléaire en formations géologiques profondes. Dans une déclaration commune ultérieure de 1981, ils convenaient de ne pas entreprendre la sélection d'un site à cette fin avant la tenue d'audiences publiques en bonne et due forme au niveau fédéral et l'approbation du concept par les autorités canadiennes et ontariennes.

En septembre 1988, le ministre fédéral de l'Énergie, des Mines et des Ressources renvoyait le concept ainsi qu'un large éventail de questions relatives à la gestion des déchets de combustible nucléaire à un examen public. Cet examen public s'est fait en vertu du Décret sur les lignes directrices du processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement. Le 4 octobre 1989, le ministre fédéral de l'Environnement constituait une commission indépendante d'évaluation environnementale en prévision de cet exercice. On trouvera copie du mandat de l'examen à l'annexe A et les notes biographiques des huit membres de la Commission à l'annexe B.

Le mandat de la Commission est inhabituel si on le compare à celui de toute autre commission d'évaluation environnementale au niveau fédéral, car il est appelé à :

  • examiner un concept plutôt qu'un projet bien précis réalisé à un endroit déterminé;
  • examiner un projet pour lequel aucun organisme de mise en œuvre n'est désigné;
  • constituer un groupe d'examen scientifique formé de distingués spécialistes indépendants et chargé d'examiner la sûreté et l'acceptabilité scientifique de la proposition;
  • examiner une grande diversité de questions liées aux politiques;
  • réaliser l'examen dans cinq provinces.

EACL décrit son concept comme un mode de stockage permanent des déchets de combustible nucléaire dans une formation géologique où :

  • les déchets conditionnés sont constitués soit du combustible CANada Deutérium Uranium (CANDU) usé, soit des déchets solidifiés de haute activité provenant du retraitement;
  • ces déchets conditionnés sont scellés dans un conteneur conçu pour durer au moins 500 ans et peut-être bien davantage;
  • les conteneurs de déchets sont mis en place dans les chambres d'une installation souterraine de stockage permanent ou dans des trous pratiqués dans le sol de ces chambres;
  • les chambres de stockage sont aménagées à une profondeur de 500 à 1 000 mètres;
  • le milieu géologique est une formation plutonique du Bouclier canadien;
  • chaque conteneur de déchets est entouré d'un matériau retardateur (ou tampon);
  • chaque chambre est remblayée et scellée avec des matériaux de remblayage et d'autres systèmes de scellement de l'installation souterraine;
  • tous les puits, galeries et trous de forage d'exploration sont par la suite scellés de façon étanche de manière à ce que l'installation de stockage permanent soit passivement sûre, c'est-à-dire que sa sûreté à long terme ne repose pas sur des mesures de contrôle institutionnel.

Le coût estimatif d'une telle installation serait de 8,7 à 13,3 milliards en dollars de 1991 selon la quantité de déchets qui y seraient entreposés en permanence.

La Commission a mené ses travaux en Saskatchewan, au Manitoba, en Ontario, au Québec et au Nouveau-Brunswick. Pour établir des lignes directrices destinées à aider EACL à préparer une étude d'impact environnemental (EIE), elle a tenu des réunions de détermination de l'importance des problèmes dans 14 collectivités à l'automne de 1990. Elle a également organisé un atelier sur les questions autochtones et rencontré les représentants de Pugwash Étudiant du Canada. Elle a ensuite diffusé des lignes directrices provisoires en juin 1991 afin de recueillir les observations du public. Elle leur a donné leur forme définitive le 18 mars 1992. Le 26 octobre 1994, EACL produisait une EIE étayée de neuf rapports de référence principaux. L'examen public de cette étude a duré du 8 novembre 1994 au 8 août 1995.

Des audiences publiques se sont déroulées en trois phases. Elles ont eu lieu du 11 mars 1996 au 27 mars 1997 dans 16 collectivités canadiennes. Durant la phase I, on s'est attaché aux grands enjeux sociétaux de la gestion des déchets de combustible nucléaire. Durant la phase II, on s'est concentré sur la sûreté du concept d'EACL d'un point de vue technique et, durant la phase III, sur les vues du public au sujet de la sûreté et de l'acceptabilité du concept. La Commission a entendu en tout 531 communications verbales et reçu 536 communications écrites (voir l'annexe F). Des participants ont également eu l'occasion de présenter par écrit une brève déclaration finale au plus tard le 18 avril 1997. Dans la rédaction de son rapport, la Commission a tenu compte de tous les renseignements écrits et verbaux reçus depuis sa création jusqu'à la fin des audiences, tout comme les déclarations finales. On trouvera à l'annexe E le détail chronologique de ses activités.

Entre autres tâches, le mandat prévoyait :

  • l'examen des critères devant permettre de juger de la sûreté et de l'acceptabilité d'un concept de gestion à long terme et de stockage permanent des déchets;
  • l'élaboration d'un rapport final où l'on indiquerait si le concept d'EACL est sûr et acceptable ou devrait être modifié et quelles sont les mesures futures à prendre dans la gestion des déchets de combustible nucléaire au Canada.

Critères de sûreté et d'acceptabilité

Au chapitre 4 du présent rapport, la Commission a examiné les critères qui devraient permettre d'évaluer la sûreté et l'acceptabilité de tout concept de gestion à long terme des déchets. Ce faisant, elle est parvenue aux grandes conclusions suivantes :

Principales conclusions de la Commission :

  • L'appui du public canadien est indispensable pour assurer l'acceptabilité d'un concept de gestion des déchets de combustible nucléaire.
  • La sûreté n'est qu'un des éléments essentiels de l'acceptabilité. On doit la considérer sous deux angles complémentaires, c'est-à-dire d'un point de vue à la fois technique et social.

La Commission a ainsi défini les critères de sûreté et d'acceptabilité :

  • Pour être acceptable, un concept de gestion des déchets de combustible nucléaire doit :
    1. jouir d'un vaste appui du public;
    2. être sûr tant au point de vue technique que social;
    3. avoir été élaboré dans un cadre d'évaluation éthique et social approprié;
    4. recevoir l'appui des peuples autochtones;
    5. être choisi après une comparaison avec d'autres options sur le plan des risques, des coûts et des avantages;
    6. être mis de l'avant par un organisme permanent digne de confiance et surveillé par des autorités de réglementation auxquelles on ait aussi confiance.
  • On considérera comme sûr un concept de gestion des déchets de combustible nucléaire, après avoir soupesé tous les arguments :
    1. s'il respecte rigoureusement les exigences réglementaires qui s'appliquent («robustesse» du concept);
    2. s'il est fondé sur des analyses approfondies de scénarios élaborés dans un cadre de participation;
    3. s'il fait appel à des données réalistes, à des modèles et à des analogues naturels;
    4. s'il repose sur des données scientifiques solides et de bonnes pratiques;
    5. s'il fait preuve de souplesse;
    6. si sa faisabilité a été démontrée;
    7. s'il a été jugé comme tel après un examen par les pairs et s'il recourt à des compétences internationales.

Sûreté et acceptabilité du concept d'EACL

Après avoir appliqué ces critères au concept de stockage permanent d'EACL, la Commission est parvenue aux grandes conclusions énumérées plus bas. On trouvera au chapitre 5 un exposé de leur bien-fondé et un traitement approfondi des aspects techniques et sociaux de la sûreté.

Principales conclusions de la Commission :

  • D'un point de vue technique, la démonstration de la sûreté du concept d'EACL a été, tout bien soupesé, jugée suffisante pour une étude d'avant-projet, mais pas d'un point de vue social.
  • La démonstration n'a pas été faite que le concept de stockage permanent en formations géologiques profondes qu'a élaboré EACL jouit d'un vaste appui du public; sous sa forme actuelle, ce concept n'a pas le degré voulu d'acceptabilité pour être adopté comme mode canadien de gestion des déchets de combustible nucléaire.

Étapes futures et measures à prendre

Au chapitre 6 de son rapport, la Commission a envisagé des mesures à prendre pour garantir une gestion sûre et acceptable à long terme des déchets de combustible nucléaire dans notre pays. Voici les principales recommandations qu'elle fait à cet égard :

Principales recommandations de la Commission

Un certain nombre d'étapes supplémentaires sont nécessaires pour permettre d'élaborer un mode de gestion des déchets de combustible nucléaire susceptible de recevoir un vaste appui du public. Il s'agira notamment :

  • de rendre public un énoncé de politique en matière de gestion de ces déchets;
  • d'instaurer un processus pour s'assurer de la participation des autochtones;
  • de constituer une agence de gestion des déchets de combustible nucléaire (AGDCN);
  • de soumettre à un examen public les textes de réglementation de la CCEA en ayant recours à des processus de consultation plus efficaces;
  • d'élaborer un plan complet de participation du public;
  • d'établir un cadre d'évaluation éthique et social;
  • de concevoir et de comparer des options de gestion des déchets de combustible nucléaire.

En prenant en compte les vues exposées par les participants aux audiences publiques et en nous appuyant sur notre propre analyse, nous avons élaboré à l'intention des gouvernements les recommandations de base suivantes en ce qui a trait à un organisme de gestion. Il est ainsi recommandé :

  • qu'une AGDCN soit rapidement créée - comme nous le décrivons au chapitre 6 - sans lien de dépendance avec les compagnies d'électricité ni EACL et avec pour seul objet la gestion et la coordination de tout l'éventail des activités de gestion à long terme des déchets de combustible nucléaire;
  • que cet organisme soit entièrement financé dans toutes ses activités grâce à un fonds distinct auquel seuls les producteurs et les propriétaires de déchets de combustible nucléaire versent des contributions;
  • que son conseil d'administration, nommé par le gouvernement fédéral, soit représentatif des principaux intervenants;
  • qu'il dispose d'un conseil consultatif solide et dynamique qui représente tout un éventail d'intéressés;
  • que ses objectifs, ses responsabilités et les comptes qu'il doit rendre, plus particulièrement par rapport à la propriété des déchets, soient nettement et expressément indiqués, de préférence dans une loi ou dans son acte constitutif;
  • qu'il soit assujetti à de multiples mécanismes de surveillance, et notamment à un contrôle réglementaire fédéral de ses travaux techno-scientifiques et du bien-fondé de ses garanties financières, à une direction fédérale sur le plan des politiques et à des examens publics réguliers, de préférence de la part du Parlement.

Tant que les mesures que nous venons d'énumérer n'auront pas été exécutées et que le public n'aura pas largement accepté un mode de gestion des déchets de combustible nucléaire, la recherche d'un site précis devrait attendre.

Si l'on devait choisir le concept d'EACL comme la solution la plus acceptable après l'exécution des mesures que nous venons de recommander, les gouvernements devraient demander à l'AGDCN, tout comme à Ressources naturelles Canada et à la CCEA ou à l'organisme qui pourrait lui succéder, d'examiner toutes les lacunes sociales et techniques constatées par le Groupe d'examen scientifique et les autres participants à l'examen, de fixer des priorités à ce sujet et d'établir un plan destiné à remédier à ces insuffisances. L'AGDCN devrait rendre son plan public, solliciter les vues du public et ensuite mettre le plan en application.

Nous exposons au chapitre 6 des recommandations complémentaires et détaillées sur les étapes futures et les mesures à prendre. Il est question aux chapitres 2 et 3 et dans les annexes des autres aspects du mandat de la Commission.