Commentaires la Société pour vaincre la pollution (SVP) soumis à l'Agence d'évaluation d'impact du Canada sur la Description initiale du projet (DIP) de mine d'or Marban

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Commentaires la Société pour vaincre la pollution (SVP) soumis à l'Agence d'évaluation d'impact du Canada sur la Description initiale du projet (DIP) de mine d’or Marban [1] (#_ftn1)situé près de Val-d'Or dans la région administrative de

l’Abitibi-Témiscamingue du Québec.

Décembre 2022

 

 

 

Raison d’être – justification du projet

 

Contrairement aux mines de métaux de base, de terres rares ou de lithium et graphite (pour des batteries de véhicules électriques), la justification de cette mine d’or à ciel ouvert, qui implique un détournement de cours d’eau, reste à faire dans l’état actuel du milieu visé – qui a déjà subi les impacts de multiples projets miniers aurifères depuis les années 1940.

 

Selon la Minière 03, le promoteur de ce projet, cette nouvelle mine d’or se justifie :

 

« (…) par la hausse des investissements pour les métaux précieux comme l’or depuis 2020. L’incertitude créée par la pandémie de la COVID-19, l’inflation et l’incertitude des marchés fait de l’or une valeur refuge pour les investisseurs »

 

Pour la SVP, ceci n’est pas une justification suffisante pour ce projet de mine d’or, compte tenu des impacts permanents qu’elle aura sur le territoire. Les impacts de la pandémie et la crise inflation actuelle ne seront en aucune façon atténués par cette mine d’or. Et offrir une valeur refuge à des investisseurs ne justifie en rien les risques d’une perte de biodiversité, les perturbations aux régimes hydrologique et hydrogéologique des  multiples fosses minières du projet ainsi que les impacts sur la vie des gens vivants à proximité du site minier.

 

Dans sa forme actuelle, l’Agence n’aurait pas dû accepter la présente « raison d’être – justification du projet » dans la Description initiale du projet (DIP) soumis par le promoteur comme étant conforme à la Loi sur l’évaluation d’impact (LEI — L. C. 2019, c. 28) de 2019 et au Règlement sur les renseignements et la gestion des délais (DORS/2019-283) et qui ne respecte pas l’esprit du Guide de préparation d’une description initiale de projet de l’AEIC.

 

 D’ailleurs à la page 33 de la DIP, le promoteur cite Ressources Naturelles Canada  qui dit que seulement

 

« (…) 8 % de l’or produit est utilisé pour des applications technologiques, principalement

des microcircuits et un éventail de produits électroniques. (…)»

 

Ainsi, l’utilité véritable d’une autre mine d’or se pose. Le concept de l’or comme valeur refuge est dépassé dans le contexte de la crise climatique, de la perte biodiversité et des limites environnementales.

 

 Il y eut une réponse très révélatrice de la part de la minière 03 sur l’usage de l’or qui sera produit à la mine :

 

Intervention 16 p. 116 de la DIP

 

« Vous qui allez exploiter l’or, pouvez-vous dire quel est le besoin en or? À quel besoin on répond? »

 

Jean-Félix Lepage  de la minière 03 : « Je vends de l’or, je ne l’achète pas, la question serait très bonne pour un acheteur d’or. Il y a plusieurs utilités autant au niveau financier que pour l’électronique, etc. Quelles sont les proportions? Je n’ai pas l’information. »

 

Comme c’est écrit plus haut, M. Lepage aurait dû lire la page 33 de sa propre DIP…

 

De plus, le promoteur reconnaît – avec raison — à la section 5.2 de sa DIP, qu’il n’y a 

 

« Aucune évaluation régionale se rapportant au projet n’a été ou n’est effectuée en application des articles 92 ou 93 de la LÉI. »

 

Mais de l’avis de la SVP, il y aurait effectivement lieu de faire une telle évaluation régionale du  secteur aurifère dans la Vallée de l’Or. Seulement dans la région immédiate du projet Marban, il y a eu depuis 1940 au moins 10 mines d’or exploitées. Seulement sur le territoire de Marban régional (voir figure 4 de la DIP à la page 51), les 5 mines d’or souterraines ont extrait 5 372 000 tonnes de minerai donnant plus de 873,000 oz d’or[2] (#_ftn2).

 

Pour la SVP, la question qu’une telle évaluation régionale sur le secteur aurifère dans la Vallée de l’or devra poser est la suivante : compte tenu du  passif environnemental relatif à l’extraction aurifère dans la région, une autre mine d’or est-elle souhaitable? Il est possible, dans ce cadre d’analyse, que le projet Marban soit une mine d’or de trop?

 

 

Les forages exploratoires : les impacts actuels et continuels du projet Marban.

 

Même avant d’extraire sa première once d’or, le projet de mine d’or Marban a eu des impacts négatifs sur l’environnement et le milieu de vie de la région lors de sa phase exploratoire.

 

Or, dans la description des impacts du projet dans la DIP, il est seulement question des phases de la construction, de l’exploitation et de la fermeture de la mine. 

 

Pourtant, la minière parle elle-même des travaux d’exploration qui débutent en1940 par Norbenite Malartic Mines qui se poursuit depuis 2006 avec près de 1000 trous de forages sur 281,000 m cumulatifs[3] (#_ftn3)et[4] (#_ftn4).

 

Le promoteur fait état des  

 

« Creusement de tranchées et des forages approfondis à la surface et sous terre. Au moins 14 sociétés

différentes ont exploré et/ou exploité des parties de la propriété entre 1940 et 1994. À la suite de la prise de contrôle de Ingold, Minière Osso a réalisé 26 sondages totalisant 15 171 m en 2016 et 2017 dans les extensions en profondeur des gisements Marban, Norlartic et Keriens. »

 

Et il ajoute que :

 

« Depuis la création de Minière O3 en 2019, l’attention a été portée sur l’exécution de forage d’exploration. Quatre cent quatre-vingt-huit (488) trous ont été complétés en date de la fin du troisième trimestre de 2022, représentant 131 576 m de forage »

 

Pourtant dans les commentaires reçus par le promoteur lors des rencontres publiques avec la communauté en septembre 2021, il y a eu les commentaires et les réponses suivantes :

 

« Présentement, ils font des chemins dans le bois, les camps de chasse sont là et ça fait tasser les orignaux. J’ai des caméras depuis le mois de mai et j’ai mille photos par mois facilement et depuis qu’ils ont fait le chemin, j’ai 3 photos par semaine. Les orignaux sont tous tassés. »

 

 

Myrzah Bello (de Minière 03) : « Il y a des chemins que nous devons faire pour passer nos foreuses, et

présentement pour les deux périodes de chasse, nos travaux sont arrêtés.

 

« Parce que la chasse, la préparation c’est bien plus que deux semaines. Cela fait

3-4 semaines que les foreuses sont là et on voit déjà une différence. »

 

Myrzah Bello : «  L’accommodement qu’on fait c’est vraiment d’arrêter nos travaux durant les

deux périodes de chasse pour la santé et sécurité de tous et pour laisser les gens chasser.

Nous essayons de faire les chemins le plus efficacement possible afin de minimiser l’impact

sur l’environnement comme la coupe d’arbres, mais nous devons nous rendre à certains

points.[5] (#_ftn5)[5][5] »

(mes soulignés)

 

Il est évident dans ces échanges qu’il y a déjà eu des impacts réels du projet en phase exploratoire sur la grande faune terrestre. L’effet de l’évitement du territoire par l’orignal causé par le bruit du forage exploratoire est documenté par des caméras de chasse. Mais la réponse de la représentante de la minière maintient que cet impact n’est pas important pour le promoteur, même s’il est démontré que les deux semaines d’arrêt des forages pour la saison de chasse n’est pas une mesure de mitigation efficace vu que le dommage est fait bien avant que débute la saison.

 

Cet échange entre un usager du territoire et la minière démontre une incompréhension des usages traditionnels du territoire de la part du promoteur du territoire.

 

De plus, malgré le fait que cet impact précis – l’évitement du territoire par la faune causé par le bruit – a été documenté, la partie E de la DIP portant sur les effets potentiels du projet n’en parle pas. En effet, les forages exploratoires sont exclus dans l’identification des principales sources d’effets potentiels selon les phases

du projet (tableau 7 p 71 de la DIP) qui doivent décrire selon le promoteur :

 

«  les changements qui risquent d’être causés par les activités du projet Marban »

 

Voici un autre commentaire (à la p. 115 Intervention 14) sur les impacts des forages exploratoires déjà vécu par les gens du milieu :

 

« Moi je suis une résidente pas mal impactée depuis huit ans, par le bruit. Je vois que dans les

travaux à venir ce sera encore le cas. Les études géotechniques, ça, ça mène du bruit. J’ai déjà

rencontré l’agente de liaison communautaire, Annabelle, car encore une fois, on n’a pas été

informés. La transparence et la communication, c’est difficile. J’espère qu’avec Annabelle ça va

s’améliorer, mais c’est bien difficile. Le drill est là, on le sait le matin, car on l’entend cogner. Ça

fait huit ans là, je suis tannée. Donc, je veux le savoir d’avance et est-ce que vous prévoyez les

faire durant toute l’année ? C’est en arrière de chez nous. Je les entends parler. »

(mes soulignés)

 

Exclure les impacts des forages exploratoires est un non-sens.

 

Si l’on regarde l’historique des travaux exploratoires dans le secteur du projet, il y aurait eu, en date du mois d’octobre  2022, selon la compilation faite par la SVP 1 et 3, plus de 2316 tous de forage avec une distance linéaire cumulative de 562,908 m soit la distance entre Montréal Toronto.

 

Il est évident que ces activités des forages exploratoires, avec la génération et le probable déversement de boues de forages, auraient déjà affecté négativement le milieu. Le fait que la minière ne mentionne pas les impacts des forages est un manquement dans la DIP.

 

 

 

Émissions atmosphériques accrues causées par le choix d’une mine à ciel ouvert.

 

Dans la section qui traite des alternatives au projet (P. 45de la DIP), le promoteur mentionne que

 

« En raison de la nature du gisement, la seule option d’exploitation possible est une mine à ciel ouvert.»

 

Le rejet de l’alternative de mine souterraine serait justifié par la faible teneur en or du gisement qui nécessite le traitement de grande quantité de minerai que seule une mine à ciel ouvert peut permettre. Ce choix condamne la région de vivre avec des sautages massifs utilisant d’explosifs à base de nitrate d’ammonium, générant des gaz d’oxydes d’azote toxique et des eaux minières polluées, des poussières d’explosion et d’excavation de minerai. Les fosses résultantes seront des cicatrices permanentes dans la région.

 

 Ces impacts importants découlant du choix d’une mine à ciel ouvert méritent d’être expressément mentionnés dans le tableau 7 (p. 71 de la DIP) 

 

Rentabilité du projet Marban sans fosses sur la rivière

 

Le projet prévoit le besoin de dévier la rivière Keriens pour y creuser une série de fosses minières à ciel ouvert.

 

D'après l’Agence d’évaluation d’impact, dans les dix dernières années il y a eu 12 projets de mines comportant une déviation de cours d’eau.[6] (#_ftn6)[6][6]

 

Mais les projets miniers qui menacent la biodiversité aquatique n’ont pas bonne presse vu la disparition des milieux humides et la récente rencontre de la COP15 à Montréal qui demande un engagement de protection de 30 % du territoire.

 

 Voici la réponse de la minière dans la DIP sur la question du détournement de la rivière :

 

 P.116 de la DIP

Myra Bello : « (…)  Par rapport à la déviation, notre projet sur lequel nous

allons travailler dans les prochaines semaines, c’est de faire une déviation naturelle. Le ruisseau a été

beaucoup impacté par les opérations passées et par certaines activités actuelles. La déviation va servir

de compensation, mais aussi à améliorer le ruisseau en tant que tel. La déviation naturelle va faire en

sorte que cela n’aura pas l’air d’un travail d’ingénierie. »

 

Ainsi, la minière voit dans le détournement une “compensation” qui va “améliorer le ruisseau”.

 

La SVP doute qu’une dérivation ait un effet “d’amélioration” sur la rivière Keriens. Il suffit de voir l’impact de la déviation de la rivière Rupert (Baie de James) et l’impact sur les esturgeons.

 

Il serait important, avant d’aller plus loin dans ce projet, de savoir si une telle dérivation est acceptable sur le plan de la conservation des habitats aquatique et des aires d’oiseaux migrateurs.  

 

Dans le cas échéant ou la dérivation serait refusé, il est clair dans l’esprit du promoteur, sans les fosses minières dans l’emprise de la rivière Keriens, que le projet n’est pas rentable.

 

 P. 155

Intervention 20

« Le projet Marban, est-ce obligatoirement les 2 fosses, est-ce que le BAPE pourrait autoriser une seule fosse? »

Myrzah Bello : ‘C’est tout ou rien. Ça ne serait plus économique. »

 

Donc, il serait opportun d’avoir rapidement un verdict de Pêches et Océan (habitat du poisson) et d’Environnement Canada (habitat oiseaux migrateurs) sur le projet de dérivation de la rivière Keriens.

 

 

Les effets cumulatifs 

 

Les effets cumulatifs de plus de 80 ans d’exploration et d’exploitation minière3 dans la zone du projet n’ont pas été mentionnés dans la partie des impacts du projet.

 

Pourtant, en vertu de l’article 22(1 a ii) L’évaluation d’impact d’un projet prend en compte (…) : les effets cumulatifs que sa réalisation, combinée à l’exercice d’autres activités concrètes, passées ou futures, est susceptible de causer (…)

 

Vu que ce projet sera évalué par l’Agence ou par une commission, il serait important que le promoteur fasse une analyse des impacts de son projet dans le contexte d’un milieu déjà fragilisé par des activités minières passées.

 

Il est évident que le promoteur est conscient du passif environnemental de la zone du projet quand il dit :

,

 

Intervention 28

Jean-Félix Lepage : « C’est un bon point que vous apportez et il y a une raison pour laquelle ce ruisseau

est rendu gros comme ça, c’est parce qu’il a déjà été impacté par le passé. Dans les années 1950, il

n’avait pas l’air de ça du tout. (…) »

 

P.116 de la DIP

Myrzah Bello : « (…)  Le ruisseau (Keriens) a été beaucoup impacté par les opérations passées et par certaines activités actuelles.

 

p.31

L’exploration menée sur la propriété Marban remonte à au moins 1940 et comprend la cartographie géologique, l’échantillonnage, la compilation de données géologiques, structurelles et géochimiques, la prospection géophysique, le creusement de tranchées et des forages approfondis à la surface et sous terre. Au moins 14 sociétés différentes ont exploré et/ou exploité des parties de la propriété entre 1940 et 1994.

 

 

Mais il n’y a aucune discussion sur les impacts cumulatifs dans la DIP.

 

Pour la SVP, ceci est un manquement majeur. Tout ajout futur de contaminants miniers à la charge toxique déjà existante sur une ancienne zone minière peut amener un point de bascule si l’équilibre est rompu. Les travaux sur un terrain contaminé peuvent mobiliser les contaminants vers les cours d’eau. De plus, l’établissement de bruits de fond – les conditions du terrain d’avant le projet - serait vicié, car la contamination du passé pourrait être utilisée pour masquer une contamination future.

 

Pour ces raisons, vu qu’il s’agit ici de terrain ‘déjà impacté’ selon le promoteur, il faut faire le bilan des impacts ‘d’autres activités concrètes, passées’. Il se peut que la zone minière actuelle soit trop contaminée pour y accueillir une autre mine d’or.

 

 


 

[1] (#_ftnref1) Projet minier Marban ingénierie - Description initiale de projet (DIP) -Novembre 2022 – 198 p. préparé par la firme de génie-conseil WSP

 

[2] (#_ftnref2) Table 6-1: Estimated Historical Gold Production from Marban Engineering (1959–1992) dans Marban Engineering Project  NI 43-101 Technical Report & Prefeasibility Study Val-d’Or, Quebec, Canada  Effective Date: August 24, 2022 

 

[3] (#_ftnref3) Table 6-2: History of Exploration on Marban Engineering (Revised from Carrier, 2006 and Belzile, 2016) dans Marban Engineering Project  NI 43-101 Technical Report & Prefeasibility Study Val-d’Or, Quebec, Canada  Effective Date: August 24, 2022 

 

[4] (#_ftnref4)[4][4] P. 31 de la DIP

 

[5] (#_ftnref5)[5][5] Voir p. 98 Question 12 de la DIP

[6] (#_ftnref6)[6][6] Projet aurifère Century; Projet aurifère de Fifteen Mile Stream ; Projet aurifère Lynn Lake; Projet aurifère Magino

Projet aurifère Upper Beaver; Projet d’agrandissement de la mine Base de Suncor; Projet de mine d’or Côté; Projet de mine d’or Goliath; Projet de mine d’or Hardrock; Projet de mine d’or Spanish Mountain; Projet de palladium de Marathon

Projet minier Troilus

 

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    Air Quality Noise Climate change Fish and Fish Habitat Migratory Birds Wildlife / Habitat Surface Water Quality Hunting Human Health and Well-Being Need for the Project Project Alternatives Cumulative effects Biodiversity Wetlands Local Population Project Contribution to Sustainability
    Date Submitted
    2022-12-22 - 1:41 AM
    Date modified: